Actualités & analyses > Nous conseillons d’associer les élus du CE à la négociation du PSE – Actuel CE, septembre 2015
Nous conseillons d’associer les élus du CE à la négociation du PSE
Catherine Ferrière, du cabinet Tandem expertise, conseille aux représentants du personnel amenés à négocier un PSE de prendre très tôt contact avec l’administration du travail (Direccte) et de prévoir, dans un accord de méthode, l’organisation des négociations. Interview.
Votre cabinet mène des expertises pour des élus confrontés à des PSE. Huit mois après l’entrée en vigueur de la loi de sécurisation de l’emploi, quels conseils donnez-vous aux élus du personnel qui doivent négocier un plan de sauvegarde de l’emploi, un PSE ?
Je suggère en amont des négociations, la signature d’un accord de méthode entre les organisations syndicales et la direction. Cet accord peut prévoir que l’instance de négociation du PSE soit élargie à des élus du CE. Il peut prévoir des moyens supplémentaires pour les représentants du personnel et les délégués syndicaux, le calendrier tant des réunions de négociation que des réunions d’information en vue de la consultation du CE…
L’accord majoritaire sur le contenu du PSE doit prévoir une commission de suivi mixte, associant la direction et les organisations syndicales, avec une clause de revoyure afin de veiller à une bonne exécution des modalités de l’accord. En cas de non application de l’accord, les élus ne doivent pas hésiter à saisir la Direccte.
Le conseil que je leur donne, du reste, est d’être le plus en amont possible en contact avec la Direccte. Les élus qui demandent à l’administration d’user de son droit d’injonction parce qu’ils estiment ne pas avoir reçu certaines informations, par exemple, doivent veiller à formuler le plus précisément possible leur réclamation : ils doivent apporter des pièces justificatives montrant qu’ils ont demandé tel document, qu’ils ont relancé en vain la direction de l’entreprise.
Certains élus semblent douter du contrôle effectif des Direccte sur les PSE. Qu’en pensez-vous ?
Il appartient aux élus de signaler précisément à l’administration les problèmes qui se posent. Celle-ci a dès lors les cartes en main pour réagir. J’ai l’exemple d’une lettre d’observation envoyée par une Direccte à une entreprise, au milieu des 2 mois de procédure du PSE. Et bien, cette lettre est très précise. On aurait pu penser au vu du faible nombre d’emplois supprimés (13 postes) que la Direccte ne s’investirait pas autant sur ce dossier. Les élus qui avaient rencontré la Direccte pour lui faire part de leurs observations étaient repartis assez déçus par l’absence apparente de réaction. Et pourtant, le courrier de la Direccte leur donne entièrement satisfaction en rappelant à la direction des points importants comme notamment son obligation d’informer les élus sur l’effectif complet (permanent ou non) de l’entreprise, la nécessité d’établir un tableau reprenant l’ensemble des catégories professionnelles présentes dans l’entreprise et pour chacune d’elles l’effectif, les postes supprimés, les postes créés et l’organisation cible. La Direccte fait également des propositions d’amélioration pour un socle minimal concernant les mesures sociales.
Les délais sont très encadrés : imposent-ils une autre façon de négocier ?
Il faut en tout cas une parfaite coordination des différentes instances (CE, CHSCT, organisations syndicales) et ce tout au long de la mission : du démarrage, pour définir la mission confiée à l’expert sur l’assistance à la négociation jusqu’à la restitution au cours de laquelle l’expert doit fournir au CE toutes les informations utiles sur le projet d’accord.
Dans quel but ?
L’intérêt est d’aboutir à ce que les différentes parties aient le même niveau d’information, le risque étant sinon que le CE, qui dispose pourtant de l’information économique, soit tenu à l’écart. Dans le cas d’entreprises ayant un CCE, il faut aussi chercher à obtenir dans l’instance de négociation centrale des représentants de salariés des différents sites impactés par le PSE et ceci afin de prendre en compte les besoins spécifiques des salariés. Enfin, toujours dans l’idée d’avoir une bonne concertation des instances, il faut être attentif à la procédure d’information- consultation du CHSCT dès le début de la procédure. L’expert du CHSCT a un temps limité pour réaliser sa mission et le CE ne peut rendre son avis qu’après celui du CHSCT. Le CHSCT doit d’ailleurs s’emparer de la question des conditions de travail des salariés qui restent dans l’entreprise, après le PSE.
Comment concevez-vous le rôle de l’expert lors d’un PSE ?
Les représentants des salariés qui négocient l’accord sur un PSE ont une énorme responsabilité, ils peuvent parfois négocier jusqu’au nombre des suppressions d’emplois ! Mais le rôle du CE reste primordial concernant l’analyse des enjeux économiques et la pertinence des mesures envisagées par la Direction pour rétablir la situation. En effet, les éléments de la négociation dépendent avant tout des motifs économiques et organisationnels à l’origine du projet de licenciements.
L’expert aide les représentants du personnel à se coordonner et à avoir le même niveau d’information ; il les assiste dans l’analyse du projet de réorganisation et les aident à formuler des propositions alternatives (tant sur le plan économique que social).
Par Bernard Domergue
Actuel CE – septembre 2015