Condamnation pénale pour une société absorbante ayant commis des faits antérieurs à la fusion par la société absorbée
La Cour de cassation retient désormais qu’en cas de fusion-absorption, la société absorbante peut être condamnée pénalement à une peine d’amende ou de confiscation pour une infraction commise par la société absorbée avant l’opération.
Les limites du transfert de responsabilité pénale de la société absorbée à la société absorbante
Ce transfert de responsabilité pénale ne s’applique qu’aux fusions-absorptions entrant dans le champ de la directive européenne relative à la fusion des sociétés anonymes (directive 78/855/CEE du Conseil du 9 octobre 1978, codifiée en dernier lieu par la directive (UE) 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017).
A ce titre, il convient cependant de préciser que la directive relative aux fusions des sociétés anonymes est également applicable aux SAS (article L 227-1 al.2 du Code de commerce).
En outre, seules les peines d’amende et de confiscation sont susceptibles d’être prononcées à l’encontre de la société absorbante. Cette limitation s’impose en raison du fondement du transfert de responsabilité pénale, qui découle de la transmission universelle du patrimoine de la société absorbée à la société absorbante.
Un revirement de jurisprudence
La Cour de cassation opère, par cet arrêt du 25 novembre 2020, un revirement de jurisprudence mais en considérant dorénavant la spécificité des personnes morales.
Jusqu’à cet arrêt du 25 novembre 2020, la Cour de cassation retenait que nul n’est responsable pénalement que de son propre fait et que le décès du prévenu entraîne l’extinction de toute poursuite pénale en assimilant juridiquement la dissolution de la société absorbée au décès d’une personne physique.
Prenant appui sur une décision récente de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, elle abandonne ainsi une conception qui assimilait la dissolution d’une personne morale au décès d’une personne physique pour privilégier la spécificité des personnes morales, dont l’activité économique se poursuit au sein de la société qui les a absorbées.
Cette interprétation renouvelée des textes internes, permise par le droit issu de la CEDH et induite par le droit de l’Union Européenne, permet d’éviter que la fusion-absorption ne fasse obstacle à la responsabilité pénale des sociétés.
Cependant, ce revirement de jurisprudence ne s’appliquera qu’aux opérations de fusion conclues après le 25 novembre 2020, date de l’arrêt, afin de ne pas porter atteinte au principe de prévisibilité juridique.
Par ailleurs, la Cour de cassation juge également pour la première fois que la responsabilité pénale pleine et entière de la société absorbante peut être engagée si l’opération de fusion-absorption a eu pour objectif de faire échapper la société absorbée à sa responsabilité pénale. En effet, dans ce cas, l’opération de fusion constitue une fraude à la loi. S’agissant d’un principe qui n’était pas imprévisible, il reçoit une application immédiate et s’applique en conséquence à toutes les fusions, quelle que soit leur date.